• SIDA

    Les premières campagnes de vaccination contre la poliomyélite pourraient être à l’origine de la propagation du VIH et de l’épidémie de sida.

    Malgré les percées spectaculaires dans le traitement du sida, l’origine de l’épidémie demeure encore un mystère. Le VIH semble être le descendant direct d’un VIS - virus d’immunodéficience simienne - porté par les chimpanzés africains. Mais comment le virus s’est-il transmis du singe à l’homme ? Dans son livre The River, A Journey to the Source of HIV and AIDS (La Rivière : retour aux sources du VIH et du sida), le britannique Edward Hooper expose une surprenante théorie. Il soutient que l’épidémie de sida est le résultat d’interventions médicales en Afrique durant les années 50, plus spécifiquement l’administration de plus de un million de doses d’un vaccin oral expérimental contre la poliomyélite. Certains lots de ce vaccin auraient été fabriqués à l’aide de cultures cellulaires provenant de reins de singes, possiblement contaminés par le VIS.

    Ancien journaliste de la BBC, Edward Hooper n’est pas l’auteur de cette audacieuse théorie, déjà énoncée en 1992 par une poignée de scientifiques. Dix années de recherche, pendant lesquelles il a réalisé plus de 600 interviews à travers le monde et analysé plus de 4 000 textes, l’ont cependant conduit aux mêmes conclusions que ces scientifiques. Il décide alors de livrer le contenu de ses recherches en publiant un livre rédigé comme une véritable enquête policière.

    Sans omettre aucun détail, Edward Hooper décrit l’histoire des premiers cas de sida en Amérique et en Europe. Il explore aussi les nombreuses hypothèses portant sur l’origine de l’épidémie, dont celle, encore nébuleuse mais généralement acceptée, du transfert naturel du virus par la rencontre entre chimpanzés et humains, principalement à cause de la chasse et de la garde d’animaux de compagnie. L’auteur a même retracé des données inédites, à partir desquelles il a constaté que les cartes de localisation des premières vaccinations contre la polio étaient étonnamment similaires à celles de l’émergence des premières traces du VIH (le plus ancien exemplaire du VIH connu à ce jour a été recueilli chez un Africain de Léopoldville en 1959). Fait troublant, tous les cas connus de VIH recensés en Afrique avant 1981 sont apparus à l’intérieur d’un rayon de 160 kilomètres des villes ayant fait l’objet des premières campagnes de vaccination antipolio, entre 1957 et 1960.

    En présentant ces faits dans un imposant ouvrage de plus de 1 000 pages, Hooper touche une corde sensible du monde scientifique et soulève l’épineuse question de l’éthique dans la recherche. En effet, Hilary Koprowski, le médecin responsable des premiers essais de vaccination, était à l’époque en compétition et en conflit avec Albert Sabin et Jonas Salk, qui avaient mis au point des vaccins contre la polio. Il reste très peu de traces de la recherche menée dans les camps de vaccination mais, dans cette course au virus, il est possible que, malgré de nobles intentions, l’attrait du prestige et de la fortune ait pu mener à de graves négligences aux implications énormes.

    Bien qu’on ait trouvé des traces d’un virus simien - le SV40 - dans les vaccins oraux de polio fabriqués à cette époque, on n’y a pas encore relevé la présence du VIH. Un exemplaire de ce vaccin est conservé depuis 40 ans dans un réfrigérateur de l’institut Wistar à Philadelphie. Il pourrait être un argument décisif en faveur de la théorie d’Edward Hooper mais personne ne veut ouvrir ce réfrigérateur, on se demande bien pourquoi...

    The River, A Journey to the Source of HIV and AIDS, par Edward Hooper. London : Little, Brown and Company, 1999. 1 070 pages.


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